Je m’installe au volant de mon vieux break, ça démarre, ça roule, rien ne claquette, mais une petite chose m’inquiète, pourquoi il y a du noir sur mes phalangettes?

Ma Peugeot 304 de 1978 arbore une jolie robe couleur acacia, ponctuée ça et là de chrome. Je me rappelle une publicité de mon enfance qui disait : En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées. Le fait de mettre du plastique dans les habitacles des voitures était surtout fait pour transformer et par conséquent vendre du pétrole aux manufacturiers. Peut-on parler de plastique? Quand je regarde le tableau de bord et le volant qui se désagrègent, je me dis qu’il devait manquer un additif dans la composition pétrolifique*.

Ainsi, je décide de prendre le problème en mains afin que celles-ci ne ressemblent plus aux paluches : Petit a : d’un routier, petit b : d’un mécanicien après une dure journée de labeur. Je vous laisse choisir le corps de métier. Je tiens à rappeler que je n’ai rien contre ces professions sachant qu’un mécanicien compétent est indispensable pour entretenir notre passion et que, comme disait le regretté Max Meynier : « Les routiers sont sympas ».

Je pense dans un premier temps à installer un volant en bois. Après une rapide réflexion… pécunière, je me dis qu’à 600 euros, mon humble break ne veut pas jouer dans la cour des cabriolets qui cranent avec cet accessoire ostentatoire. Certes, son prix, logo Peugeot sur fond rouge à l’ancienne en prime sur le moyeu, a refroidit mon compte bancaire, mais honnêtement, je ne vois pas l’intérêt de l’achat d’un tel objet, magnifique soit-il, pour une voiture au tableau de bord so(m)bre.

Je continue ma recherche googolesque avec des mots clés de base : Volant peugeot 304. Et sur mon écran s’affiche le graal : Un Quillery, la marque d’un accessoiriste d’époque et accessoirement une pièce d’orfèvre à… 1200 euros. Je montre l’objet à mon comptable, ayant aussi la qualité d’épouse. Je fais un petit hochement vertical de la tête pour la questionner sur la faisabilité de la transaction. Elle me répond par un geste latéral négatif de la tête.

Le volant original de ma 304 étant introuvable, je décide de me renseigner sur sa restauration. Pour 60 euros, on trouve des kits de produits chimiques pour réparer et teinter la matière. Le problème n’est plus d’ordre pécunier mais éco-responsable. Non, mon 1300 cm3 n’a pas de pot catalytique et dégage une dose de Co2 que mes oeillères de passionné m’empêchent de voir lors de mes déplacements. Ceci n’est pas une raison pour consommer des produits chimiques en sus, sachant qu’une quantité non négligeable partira en déchetterie car elle sera non utilisée et finira par sécher dans son contenant.

Je décide enfin d’acheter dans un endroit pas mauvais** un cerceau fait en anhydrure de polyoxybenzylméthylèneglycol. Premier plastique fait de polymères synthétiques du benzène sous solvants. Encore du pétrole, mais ce volant a été fabriqué il y a près de cinquante ans, donc il y a prescription.

  • Cinquante ans? Donc, il n’était pas monté sur les break de fin de série?
  • Non
  • Tu ne peux pas faire ça?
  • Si, si. Je vais acheter un modèle qui était monté sur les 204 mais aussi sur les premières 304.
  • Mais elle ne sera plus dans son état d’origine.
  • Ce n’est qu’un volant mon cher ami. Et puis, c’est ma femme qui tient les comptes. A 60 euros avec les frais de port, cela lui va bien.
  • Alors si c’est ta femme qui décide!

Voilà, le volant en bakélite devrait arriver d’ici quelques jours en colis si momo fait bien son travail. J’ai hâte de sentir le cerceau entre mes mains, apprécier son design plus vintage, un peu moins basique que son cadet. Et puis, si les températures hivernales viennent à refroidir la matière, je glisserai mes phalangettes dans des gants de cuir, me prenant un court instant pour Daniel Sauvage***, comme le lion trônant sur ses pattes arrières au centre du bandeau de plastique.

  • * Pétrolifique : Amalgame de pétrole et prolifique
  • ** Le bon coin
  • *** Danny Wilde